On ne peut prétendre être un grand amateur de cigares haut de gamme si on n’a pas investi dans au moins une cave à cigares. Cet écrin, nécessaire pour conserver correctement des pièces de grande qualité et de grande valeur, obéit à des règles de fabrication précises et rigoureuses. Leur manipulation doit également se faire avec précaution. Voici plusieurs points clefs qu’il faut connaître pour acquérir, optimiser l’utilisation d’une cave à cigares et assurer une excellente conservation de sa collection de cigares.
Une cave à cigares pour protéger son patrimoine
Les inconditionnels ne le nieront pas : l’achat de cigares constitue un investissement financier. À ce titre, chaque pièce acquise mérite d’être traitée avec le plus grand soin que ce soit lors du stockage afin de la faire vieillir ou lors de sa conservation à court terme. Pour ce travail de bénédictin, la cave à cigare est incontournable. C’est dire combien son utilisation fait partie de la routine du fumeur. Elle doit s’imposer dans son rituel s’il souhaite éviter que ces rouleaux de feuilles confectionnés à la main soient endommagés ! En somme, le recours à une cave à cigares permet à l’amateur de préserver ses investissements. Ici, la logique fait intervenir une autre dimension vénale. Parce qu’une fois rempli de cigares cet écrin peut facilement valoir des centaines d’euros, voire des milliers, il faut reconnaître qu’il peut être vu comme la malle aux trésors du fumeur confirmé.
Les premières caves à cigares
Cela fait plusieurs siècles que les caves à cigares existent. Toutefois, c’est seulement vers 1800 que leur usage se répand et qu’elles deviennent populaires au sein de la communauté des fumeurs. Le coffret typique de cette époque est entièrement en bois massif. Le couvercle et la structure de base sont reliés à l’aide de charnières. Malheureusement, la plupart de ces boîtes ont en commun un défaut : le bois utilisé pour leur fabrication n’est pas le cèdre d’Espagne ! Concrètement, elles se prêtent plus à la conservation des cigares de qualité moyenne, voire médiocre, qu’à celle des créations premiums dont le stockage est particulièrement délicat.
À la même époque, des coffrets en étain font également leur apparition et sont considérés comme d’une grande originalité. Malheureusement, à cause justement du choix de cette matière, ils ne présentent aucun avantage en termes d’efficacité pour les collectionneurs souhaitant faire vieillir leurs cigares. Ce sont des caves clinquantes dont l’intérêt est principalement esthétique, car elles sont généreusement décorées avec des motifs complexes.
Si les fabricants de l’époque ne se souciaient pas du type de matière utilisée, c’est parce que la cave à cigares avait des objectifs autres que celui qu’on lui reconnaît à l’heure actuelle. Les cigares étaient disposés dans ces casettes en bois ou en étain pour éviter qu’ils ne s’éparpillent à même sur la table et pour permettre leur transport sans endommager leur allure (ainsi, il n’y a pas de risque qu’ils se retrouvent écrasés). Mais la préoccupation des fumeurs change petit à petit puisqu’ils se mettent à rechercher des boîtes capables de conserver durablement leurs cigares sans que leurs caractéristiques aromatiques, techniques et physiques ne soient altérées. C’est à cette nouvelle exigence que l’on doit les caves à cigares telles qu’elles sont fabriquées aujourd’hui.
Le modèle en bois de cave à cigares à charnières continue d’être présent sur le marché. La raison en est que les fabricants n’hésitent pas à reprendre cette « architecture » pour certaines de leurs créations haut de gamme. L’évolution dans le temps du design des caves à cigares est associée au changement du type de profil du fumeur. Au fil des années, les riches hommes d’affaires ainsi que les bourgeois, les personnalités politiques et les intellectuels se sont mis aux cigares et en deviennent même de grands amateurs. Pour répondre aux exigences esthétiques de ces nouveaux clients, les caves à cigares en bois reçoivent une meilleure présentation : elles sont richement décorées (les charnières arborent des motifs complexes) et, dans le même temps, elles deviennent pratiques grâce à l’accumulation des options facilitant leur manipulation (agrafes, serrures…).
Le cèdre d’Espagne
Il n’y a pas meilleur bois pour fabriquer une excellente cave à cigares. Ces dernières sont aujourd’hui en majorité taillées dans du cèdre d’Espagne. Plusieurs raisons expliquent ce choix. Il y a tout d’abord son agréable parfum que l’on devine facilement dans un grand nombre de cigares combien même il s’agit d’une présence timide. Cette présence a deux origines. Les fabricants utilisent le cèdre dans le processus de vieillissement de leurs cigares et même pour les emballer avant de les commercialiser. N’importe quel fumeur d’Arturo Fuente le confirmera : la marque enveloppe ses cigares dans une feuille de cèdre qu’il faut retirer avant de les allumer. Ce procédé fait pénétrer la senteur du cèdre au cœur du cigare ce qui contribue à l’adoucir et, dans le même temps, à enrichir davantage son panel aromatique. D’autres espèces de bois sont admises pour la fabrication de la cave à cigares avec néanmoins le risque que leur forte senteur boisée réussisse à éclipser une bonne partie des arômes naturels des cigares. On peut citer le Thuya occidental (cèdre blanc) ainsi que le bouleau.
L’autre raison est que le bois de cèdre espagnol n’est pas affecté par l’humidité : il a la capacité de rejeter et de conserver l’eau selon un processus d’autorégulation. L’humidité est donc maintenue en permanence à un niveau adéquat, adapté à la conservation des cigares. Ce mécanisme d’autorégulation est absent chez les autres variétés, ces dernières (le pin, l’acajou…) manquant de porosité. On le constate lorsque, pour la construction d’une terrasse ou d’une véranda, on se sert de bois qui n’ont pas fait l’objet d’un traitement autoclave. Après une exposition répétée à la pluie et à la neige, les charpentes se déforment. Parce que le bois est insuffisamment poreux, l’eau qui s’y infiltre reste piégée, le faisant gonfler et fléchir. Ce phénomène n’est pas susceptible de se produire avec le cèdre d’Espagne, car, comme on l’a précédemment noté, il absorbe et libère l’humidité grâce à ses multiples pores. C’est ainsi que dans une cave à cigare élaborée avec du cèdre d’Espagne il est relativement aisé de maintenir un taux d’humidité de 65 % à 75 %, niveau requis par les cigares.
La dernière raison est que le cèdre d’Espagne ne peut constituer un nid pour les vrillettes du tabac. Ces espèces de coléoptères infestent les plantations et se nourrissent voracement des plantes de tabac. Pire, elles pondent dans les feuilles et leurs œufs résistent aux séchages et fermentations. Ils éclosent lorsqu’ils sont soumis à un niveau d’humidité de 75 % couplé à une température de 70 degrés, autrement dit, à des conditions offertes par une cave à cigares hermétique. Or les innombrables pores du cèdre d’Espagne forment un système naturel de ventilation empêchant d’atteindre cette température. Les œufs seront alors détruits une fois le cigare allumé.
Une fabrication soignée
La qualité d’une cave est fondamentale si l’on souhaite conserver les cigares dans d’excellentes conditions. Les meilleures caves sont celles en cèdre d’Espagne massif avec un couvercle fixé à la base par des charnières. Pour réduire les coûts de production, les fabricants avaient un temps opté pour une astuce qui s’est souvent avérée efficace : utiliser d’autres variétés de bois tout en tapissant entièrement l’intérieur de lamelles de cèdre d’Espagne. L’efficacité du système dépend en fait de la solidité du bois choisi, car il doit résister à l’humidité libérée par le cèdre. Si ce n’est pas le cas, il se gorge petit à petit d’eau, se gonfle et se déforme. La cave à cigares finit par être totalement inutilisable. Pour éviter cette situation, on pourrait penser qu’un bois plus épais ferait l’affaire (le chêne par exemple). Grosse erreur ! Cette fois-ci, on court le risque d’une mauvaise ventilation : toute la chaleur échappée de la doublure en cèdre ne peut être évacuée, car le bois composant la structure de base est insuffisamment poreux. Il en résulte une surchauffe à l’intérieur de la cave ce qui est propice à l’éclosion des œufs déposés par les vrillettes du tabac. Ces petites bêtes vont non seulement se nourrir du tabac formant les cigares mais elles se mettent également à grignoter le bois. La cave s’affine alors à certains endroits et des brèches font leur apparition. Puis, un beau jour, c’est la catastrophe : le coffret se retrouve en morceau avec en prime, la nécessite d’en racheter un nouveau. En conclusion, il vaut mieux investir dans une cave tout en cèdre d’Espagne malgré le prix élevé, car il est sûr et certain qu’elle est solide.
D’autres matières que le bois
Souvent, les caves de voyage ne sont pas en bois. Elles sont fabriquées en plastique très solide et reçoivent une mousse en doublure. La plupart sont équipées d’un petit humidificateur chargé de cristaux de polymères acryliques. Ces derniers garantissent continuellement un taux d’humidité de 70 % tout en offrant une parfaite étanchéité à l’air.
L’eau du robinet, ennemie de la cave à cigares
L’eau du robinet est à proscrire lors de la préparation et de l’entretien de la cave à cigares, notamment, au moment d’humidifier les parois ou encore pour en asperger l’humidificateur. Cette eau regorge de germes, de bactéries, de microbes et de contaminants. Ces micro-organismes sont synonymes de fin de vie pour la cave à cigares, car ils se logent dans les innombrables pores du cèdre d’Espagne, se reproduisent et se multiplient. Le développement de la colonie est favorisé par l’environnement humide qui règne dans le coffret et surtout, cela entraîne la formation d’une moisissure qui va contaminer les cigares. Ces derniers seront alors à jeter ! Une eau distillée ou une solution de propylène glycol dans le cas d’un humidificateur à mousse sont les seuls à être tolérées par une cave à cigares. Pour davantage de précautions, on préférera les cristaux de polymères acryliques à la mousse. L’utilisation combinée des cristaux et de l’eau distillée est le meilleur moyen pour prévenir les problèmes de moisissure. En revanche, les risques persistent si les cristaux sont humidifiés avec de l’eau de robinet. L’autre solution consiste à concocter un mélange liquide fait de 25 % de propylène glycol et de 75 % d’eau distillée. On le verse ensuite dans l’humidificateur rempli de cristaux de polymères acryliques.